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Ce qu’on peut retenir des 11 discours de la finale 2021 de notre concours d’éloquence

Le 16 juin dernier, à 14 heures, onze élèves de seconde se préparaient à plaider, au Panthéon, sur le thème suivant : « Avec qui voudriez-vous partager un bout de chemin ? ». Quatre mois plus tard, un bilan s’impose. Qu’en est-il ressorti ? Quels enseignements peut-on en tirer ? 

Si vous étiez présents, vous avez pu constater qu’une majorité écrasante des élèves répondait à cette interrogation par « Moi-même ». Ils souhaitaient partager un bout de chemin avec eux-mêmes. Doit-on s’en étonner ? Aurait-on, à leur âge, eu le même chemin de pensée ? Si cette réponse révèle une maturité certaine, une conscience éclairée de sa propre valeur, elle n’en est pas moins interrogatrice. 

Est-ce le reflet d’un certain sentiment de solitude, caractéristique à cet âge charnière où chacun et chacune se construit, à la frontière entre l’adolescence et l’âge adulte ? À la sortie du collège, le lycée est un nouvel environnement au sein duquel il est nécessaire de s’adapter pour y trouver sa place. La bienveillance n’y est parfois pas de mise, et il peut être difficile de s’y épanouir et se construire en tant que jeune adulte. Le harcèlement scolaire, la crise d’adolescence, le choix de l’orientation. Il nous est demandé de faire de nombreux choix, lesquels auront une influence certaine sur la majeure partie de notre vie. Or, comment choisir sans s’être construit en amont ? Sans savoir qui l’on est, ce que l’on souhaite faire et ce que l’on aime ? Ce qui nous anime ? Il peut être difficile de porter ce poids, cette responsabilité. Alors, on se recroqueville, on s’enferme, on s’efface et on se fait oublier. Et on oublie le reste. On se recentre sur nous-même, nos besoins, nos amours, nos chagrins. Rien d’étonnant alors à ce qu’à ladite question nous répondions « Moi-même ». Car c’est un âge où l’on se construit et pour cela, quoi de mieux que de passer du temps avec soi-même. 

Mais c’est aussi le reflet de notre société, individualiste, dans laquelle nous vivons. Où l’on en vient à avoir peur de l’Autre, peur d’aimer, peur de souffrir et peur de partager. Refuser de s’ouvrir devient la solution de facilité. L’individuel prend le pas sur le commun, le vivre-ensemble. Le fait que nos jeunes se choisissent eux-mêmes afin de partager un bout de chemin, n’est-ce pas symptomatique de notre société et ses travers ? De par leurs relations personnelles et professionnelles, les jeunes sont au centre de cette machine sociétale et ressentent d’autant plus les failles, les incertitudes et les craintes de ceux qui les entourent. L’on dit souvent que les jeunes portent la responsabilité de notre futur, mais pour cela nous devons avant tout leur montrer la voie, le chemin du collectif. Et non la voie individualiste que nous semblons adopter ces temps-ci. 

Néanmoins, ce sentiment de solitude – s’il résulte d’une construction « normale » à l’adolescence, n’est-il pas accentué par l’arrivée des réseaux sociaux ? L’on pourrait a priori penser le contraire. S’il est possible d’être en contact constant avec nos connaissances, nos amis et nos proches, l’on devrait se sentir moins seuls. Mieux entourés. Mais c’est pourtant l’inverse qui semble se produire. Nos échanges sont moins sincères, moins authentiques. L’on a de plus en plus de difficulté à profiter de l’instant présent. Nous rêvons de la vie des autres, mais de celle qu’ils montrent, pas de la vraie. Nous nous enfermons dans une bulle numérique, pour notre bien – pensons-nous. Mais s’il est déjà difficile pour nous, adultes, de réaliser cela, que peut-on attendre de nos jeunes ? Comment peuvent-ils se construire dans un esprit de comparaison perpétuelle ? 

Je n’ai, à titre personnel, pas de doute quant à l’impact des réseaux sociaux sur notre santé mentale, et d’autant plus lorsqu’il s’agit de jeunes qui n’ont, pour certains, pas la capacité de recul nécessaire pour les utiliser à bon escient. 

Sans oublier la crise sanitaire que nous traversons actuellement, nouveau facteur d’isolement. Si elle a permis de nous recentrer sur nous-mêmes, elle nous a également éloignés en rendant la majeure partie de nos relations virtuelles. Alors même qu’un grand nombre l’était déjà… Les jeunes ont été privés d’école et de relations sociales pendant plusieurs mois. Puis, lorsqu’il a été possible de retourner sur les bancs du lycée, ils ne pouvaient admirer que des masques, et non de vrais visages. Une barrière s’est ainsi installée entre nous, une barrière timide et sournoise mais bien présente. Pas étonnant que les jeunes ne comptent que sur eux-mêmes et n’attendent plus rien de personne. En ces temps si incertains et dans un contexte si anxiogène, difficile lorsqu’on a 16 ans de voir les choses différemment. 

Alors, bravo à nos jeunes plaideurs mais également à tous les lycéens de nous faire réfléchir, de nous faire réaliser que – peut-être, quelque chose ne tourne pas rond. Ils sont à la fois le fruit et le reflet de notre société, et le temps est peut-être venu de les écouter, de leur donner la parole.  Car ils ont bien plus à nous apprendre que nous le pensons. 

Florine PERBOST pour la série d’articles “Nos Plumes” de Trouve Ta Voix

PS : Vous pouvez retrouver la vidéo récap de cet évènement ici et le replay intégral via ce lien.

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